L’Algérie mise sur l’agriculture
Il faut d’abord traverser des plaines céréalières, puis des hauts plateaux, des champs de melons, des lignes de cactus, des vignobles de raisins de table, quelques rares bandes de moutons... Et puis, dans une terre sableuse et sous un climat aride, c’est Aïn Oussara. Nous sommes à 200 km au sud d’Alger, dans la wilaya (région) de Delfa. Là, derrière un poste de sécurité, un énorme abattoir en construction.
Des projets agro-industriels fleurissent dans le pays
Avec des ressources pétrolières en chute, l’Algérie, comme le Nigeria en dessous, mise sur l’agriculture. Des projets agro-industriels fleurissent dans le pays. Ils sont menés par des hommes d’affaires locaux, parfois associés à des étrangers (49 % des parts maximum). Objectif : atteindre l’autosuffisance alimentaire, voire exporter. « Nous voulons atteindre 5 % de croissance agricole annuelle et baisser la facture des importations alimentaires de 30 % d’ici 2019 », expliquait déjà Chérif Oamri, du ministère de l’Agriculture, en 2016 en présentant le programme de développement agricole du pays.
« On trait soixante vaches en dix minutes »
En lait, ce programme prévoit une « réduction à 0 % de l’importation de poudre de lait destinée à la fabrication de produits dérivés en 2019 ». Le pays en est loin.
Production laitière : les Bretons en experts
De 2012 à 2014, l’association Bretagne Filières a appuyé la filière laitière algérienne via son programme Alban. Doté de 2,28 millions d’euros (M€), Alban a permis d’augmenter de 40 % la production par vache, de produire 14 millions de litres supplémentaires et d’économiser 4,9 M€ de poudre de lait, selon BF. Les 40 formateurs bretons ont suivi individuellement plus de 300 élevages. Des conseillers ont été formés et une coopérative a été créée. « à ce jour, nous ne travaillons plus en Algérie, explique Floriane Le Norcy, qui suivait le projet. Mais les groupes d’appui locaux sont restés en place sous la tutelle de l’Office du lait et du ministère de l’Agriculture. »
Témoignages : « Aujourd’hui, en Algérie, les mentalités changent… »
Lors des trois jours de reportage, nous avons rencontré plusieurs acteurs de l’élevage algérien. Voici quelques témoignages.
• Abdelmounam Boutout est responsable technique de l’élevage reproductrices chair du groupe Boussouf à Oued Athmania, dans la wilaya de Mila, près de Constantine. Celui-ci comporte douze bâtiments pour un total d’environ 65 000 animaux. Ambiance contrôlée, refroidissement, pad cooling… : tout y est pour élever les volailles dans la modernité. « Nous avons installé des barrières sanitaires strictes – rotoluve, pédiluve – avec un accès contrôlé aux bâtiments, même pour les ouvriers », explique Abdelmounam en montrant ces installations. On comprend pourquoi il n’y a « pas de problème sanitaire particulier dans l’élevage », comme dit le jeune vétérinaire.
• Abdasselem Rabia est le patron de l’usine de prémix et CMV Safana, à Sétif, à l’ouest d’Alger. « Ici, nous fabriquons 40 tonnes/jour pour les ruminants et les volailles, explique-t-il devant la chaîne de conditionnement. Nous avons cinq points de vente dans le pays et près de 30 % du marché national. Nos principaux concurrents sont français et belges. Avant, la mentalité des gens, ici, était de préférer les produits d’importation. Mais maintenant, ça change, beaucoup reviennent à des produits locaux. »
• Boukhari Bouldjouaa, responsable de la traite dans l’élevage laitier du groupe Boussouf à Sidi Khelifa, près de Constantine : « Avec nos deux fois trente postes, nous trayons soixante vaches en 10 minutes à trois personnes et trois traites par jour, explique-t-il en actionnant le lavage automatique de la rampe d’accès d’une salle de traite ultramoderne. Pour l’instant (mi-octobre, ndlr) nous trayons 60 vaches qui donnent environ 32 kg de lait par jour en moyenne, mais à terme, nous en aurons un millier. » On comprend mieux la taille des tanks à lait dans la salle adjacente….
Merci à Abbes, notre guide du jour
« Nous assemblons des poulaillers, fabriquons des armoires électriques, achetons chez des fournisseurs italiens, hollandais, espagnols… ». Merci à Abbes Djabou, le patron de l’entreprise d’équipements de volaille Poultech, à Sidi Embarek, qui nous a conduits tout au long de ce reportage. Grâce à lui, nous avons pu rencontrer plusieurs acteurs importants de l’élevage algérien bovin et avicole.
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