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Burkina Faso

La grippe aviaire coupe les ailes du plus gros producteur d’œufs

Publié le 26/10/2022 - 17:31
Des milliers de poulets atteints de la grippe aviaire ont dû être brûlés. Photo : Faïshal Ouédraogo

Le 17 décembre dernier, la grippe aviaire est venue à bout de la société Moablaou SA dirigée par Abou Simbel Ouattara, 64 ans, à Namdé au centre du Burkina Faso. Bilan : plus de 200 000 animaux abattus et 3,2 milliards de francs de pertes.

Abou Simbel Ouattara, PDG et fondateur de la société Moablaou SA. Photos : Faïshal Ouédraogo
«Depuis ce jour, nous avons cessé les ventes, regrette Abou Simbel Ouattara, PDG de la société Moablaou SA. L’entreprise ne pouvait plus vendre un œuf, ni un poulet. Tout était arrêté, et la mortalité s’est accélérée. » En l’espace de trois semaines, la grippe aviaire a vidé toute la ferme. « Il n’y avait plus aucun poulet alors que nous en avions 157 000 en production et 47 000 poulettes », poursuit le patron de la ferme.

Un tel drame engendre évidemment d’énormes pertes pour l’entreprise. En se référant à sa comptabilité, Abou Simbel Ouattara estime la perte sèche à « plus de 800 millions de FCFA ». Cette perte a été évaluée sur la base des poulets perdus à cause de la maladie. Quant à la perte de production, elle est évaluée à « plus de 3,2 milliards de FCFA ». C’est la perte de plus d’une année entière de revenus qui provient de la production et la vente d’œufs. C’est grâce à cette somme que l’entreprise paie les salaires, les impôts et l’achat de matières premières. Et aussi qu’elle génère des bénéfices. Au-delà de la perte économique, l’entreprise a enregistré également une perte sociale et un temps précieux gaspillé.

1 200 personnes au chômage

La fermeture a entraîné des pertes d’emplois. L’entreprise collabore avec 1 200 revendeurs dont 800 femmes. Et chaque revendeur travaille avec quatre ou cinq personnes qui l’assistent dans la distribution. Désormais au chômage, toutes ces personnes avaient pour source principale de revenus, « la vente des œufs » confie le patron de l’entreprise. Le devenir de plusieurs personnes est en danger.

Rosalie Karama, revendeuse d’œufs depuis 2006 chez Moablaou, a dû trouver des œufs dans une autre ferme.
Rosalie Karama collabore avec Moablaou depuis seize ans. Grâce à la vente des œufs, elle arrivait à subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille notamment pour payer la scolarité de ses enfants. Depuis la fermeture de la société, tout a été freiné. Pour garder sa clientèle, Rosalie décide de prendre des œufs chez un autre fournisseur pour les revendre, mais les difficultés sont énormes. « À Moablaou, je prenais au moins 1 000 plaquettes d’œufs chaque semaine, dit-elle. Mais maintenant, c’est 100 plaquettes parce qu’il n’y a pas assez d’œufs chez le fournisseur ». Résultat, Rosalie « n’arrive pas à satisfaire la demande et je perds des clients ». L’autre difficulté se trouve au niveau du prix, car à Moablaou SA, les œufs sont calibrés, plus gros et vendus à 2 200 FCFA la plaquette. Cela, alors que de l’autre côté, « on a à la fois de gros et de petits œufs, mélangés et vendus à 2 300 et parfois même à 2 400 FCFA », regrette Rosalie. Aujourd’hui, toujours dans l’attente d’une autorisation des services publics de l’État, la société espère rouvrir bientôt pour compenser ses pertes.

Avancer malgré les difficultés

Le drame que Moablaou a subi n’est pas une première dans son histoire. De par le passé, l’entreprise leader de la production d’œufs au Burkina Faso a subi de grosses pertes liées à divers facteurs. Toutes ces épreuves ont forgé sa carapace. « Durant ces 35 années d’existence, si nous devions citer tous les aléas et les catastrophes que nous avons connus, nous n’en serions pas là, relativise le PDG. Dans une telle activité, nous savons que des difficultés peuvent surgir à tout moment. »

Dans le passé, la société a connu une crise en mars 2015, due déjà à la grippe aviaire. 120 000 pondeuses avaient été ravagées. Deux années plus tard, Moablaou SA s’est reconstitué en passant à plus de 200 000 pondeuses. Une autre fois, l’entreprise avait perdu 10 % de ses pondeuses suite à une coupure d’électricité. « Cela avait occasionné une perte de 6 000 pondeuses dans un bâtiment qui en contenait 50 000 », ajoute le patron de la société. Mais la plus grande épreuve avait été « la perte de deux employés » qui venaient travailler les nuits à la ferme. Cependant, Abou Simbel Ouattara reste optimiste : « Toutes les fois que l’entreprise est tombée, elle a su se relever, car notre objectif n’est pas de s’enrichir, mais d’être utile à la communauté. »

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