« Le gouvernement nous a permis d’engranger de bons résultats dans la filière coton »
Atteindre 200 000 tonnes de coton-graines en 2022. En espérant booster la filière, les autorités togolaises ont permis, en 2020, au Singapourien Olam, qui détenait jusque-là 60 % du capital, de racheter complètement la Nouvelle Société cotonnière du Togo. Trois ans après l’acquisition, les promesses ne sont pas au rendez-vous. Aussi, certains aléas se sont invités chez les cotonculteurs, qui tentent de se relancer malgré tout. Entretien avec Koussouwè Kouroufei, président de la Fédération nationale des groupements des producteurs de coton.
Combien de tonnes prévoyez-vous pour cette campagne ?
Koussouwè Kouroufei : Nous prévoyons atteindre 70 à 80 000 tonnes pour la campagne 2023-2024. Nous sommes confiants par rapport cet objectif au regard de l’évolution des choses.
Qu’est-ce qui a changé trois ans après l’acquisition de la filière par Olam ?
K. K. : Pour ce qui concerne la Fédération et Olam, nous avions des cadres de concertation, mais ils ont été bannis. Avec le contexte actuel, des cadres de concertation sont en train d’être renouvelés pour que nous puissions nous concerter à chaque moment.
Concrètement, qu’est-ce qui n’a pas marché ?
K. K. : Sur les trois ans d'Olam, nous avions pensé que le rendement serait doublé, mais c’est plutôt le contraire. Il faut également noter que certains facteurs ont fait qu’au lieu de booster la production, cela nous a plutôt affaiblis : le climat, la concurrence des filières maïs, soja, l’apparition des ravageurs jassides qui ont dévasté l’année dernière plusieurs exploitations... Tout cela a fait qu’au lieu de progresser sur les trois ans, nous avons régressé.
Y a-t-il au moins quelques points positifs ?
K. K. : Avec l’arrivée d'Olam, nous avons des semences et des produits de qualité. Aujourd’hui, le prix du kilogramme de coton est de 300 F CFA. Ce qui n’était pas le cas avant. Je voudrais aussi souligner l’appui du gouvernement sans lequel nous ne pouvons engranger ces résultats positifs.
Beaucoup de cotonculteurs immigrent vers le soja. Êtes-vous inquiet ?
K. K. : Pour ce qui concerne l’immigration de certains cotonculteurs vers le soja, nous ne pouvons pas le nier. Le producteur recherche toujours où il peut tirer un bon compte. Le prix du soja et sa culture moins contraignante ont amené les gens vers cette graine. Mais, quoi qu’on en dise, le producteur a l’obligation de faire la rotation des cultures. Ce que les gens n’ont pas compris. Ils sont allés à la production du soja et ont négligé le coton. Mais aujourd’hui, ils reviennent à la production du coton, parce que cultiver le soja deux ou trois ans sur la même parcelle ne donne rien. C’est pour cela que beaucoup produisent le soja, mais n’ont rien à la fin.
Comptez-vous les ramener ?
K. K. : Nous sommes confiants. Ceux qui connaissent le coton et son importance le savent. Aujourd’hui, au niveau des sojaculteurs, ce sont peu de personnes qui bénéficient de la production. Le producteur ne gagne rien après l’achat de sa graine. Ce sont plutôt les agrégateurs qui s’en tirent bien, au détriment des producteurs. En revanche, au niveau du coton, nous suivons le processus jusqu’à la vente à l’international. Et ce n’est pas tout, puisqu’il y a des retombées qui reviennent au producteur. Il n’y a pas ça au niveau du soja.
Aussi plusieurs sojaculteurs sont de plus en plus conscients et reviennent à la production du coton. Certes, hier le prix du soja était meilleur, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Le cotonculteur gagne beaucoup s’il produit beaucoup. Alors que si le soja est abondamment produit, son prix diminue. L’année où on n’a pas le maïs, le soja flambe, mais l’année où le maïs est abondant, le prix chute. C’est tout le contraire avec le coton. L’année dans laquelle nous avons beaucoup produit, nous gagnons beaucoup.
Récemment, vous avez effectué des voyages au Burkina Faso et en Côte d’Ivoire. C’était dans quel cadre ?
K. K. : Pour voir comment les autres font pour aller de l’avant et nous avons constaté qu’ils ont mis en place l’interprofession. Ce qui n’est pas le cas au Togo. Nous voulons nous en inspirer. Nous avons également appris pas mal de choses, notamment leurs mécanismes de fixation de prix, la collaboration entre les producteurs et les sociétés cotonnières qui peuvent faire objet de réformes à notre niveau. J’exhorte les jeunes à revenir à la production du coton. Je vous remercie.
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