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Sénégal

La génétique du Dr  Dramé

Publié le 13/11/2017 - 14:31
Le Dr Dramé, en cravate, Jean-Paul Brun (à dr.), de la société Coopex Montbéliarde, et deux employés de la ferme. Photo : A. Hervé

Le vétérinaire, propriétaire d’une ferme de vaches laitières et d’une clinique, importe des vaches françaises de races montbéliardes qu’il croise avec ses animaux locaux. Il aide aussi à l’amélioration génétique des troupeaux au Nigeria.

 

Le Sénégal est l’un des pays en Afrique où la problématique du développement de la filière bovine préoccupe le plus les acteurs de la filière. Un des aspects de ce développement est la question de la génétique, précisément de l’insémination artificielle pour l’amélioration des performances des élevages locaux. Heureusement, certains acteurs en ont fait leur affaire, c’est le cas du Dr El Hadji Daour Dramé. Il y a consacré près de deux décennies de sa carrière et semble aujourd’hui en maîtriser les contours.

Vétérinaire sénégalais, formé à l’école inter-États de médecine vétérinaire de Dakar, le Dr Dramé a suivi une formation complémentaire à la faculté de médecine vétérinaire de l’université de Liège en Belgique, en cycle de la reproduction et de la génétique. 

 

La solution : l'insémination artificielle

Installé en clientèle privée depuis 1999 à Diamniadio, une bourgade naissante d’environ 2 000 âmes située à 35 km de Dakar, il a créé Afrivet. C’est une clinique spécialisée dans les biotechnologies de la reproduction, de l’encadrement technique, la gestion d’élevages et la distribution d’intrants et matériels vétérinaires.

 

20 litres par bête et par jour

Pour ce médecin expérimenté, la survie et le développement de la filière bovine africaine passe par la transformation des produits issus des bovins. Le lait de vache constitue un marché intéressant pour les éleveurs locaux. Pour y parvenir, il faut des animaux performants, capables de répondre à un marché de plus en plus demandeur. La solution, le Dr Dramé l’a trouvée en pratiquant l’insémination artificielle. 

Depuis 2010, il dirige une ferme laitière qu’il a créée parallèlement à son activité, grâce à l’expérience génétique du croisement qu’il pratique au Sénégal depuis près de 20 ans. Cette ferme exploite des vaches issues de croisements entre des races locales et des montbéliardes importées de France. « Depuis 1999, nous avons développé l’insémination artificielle des races locales appartenant aux éleveurs traditionnels, explique le Dr Dramé. Nos montbéliardes nous sont fournies par un partenaire français avec qui nous travaillons, Coopex Montbéliarde, que nous représentons au Sénégal. » 

Deux hectares sont dédiés à l’exploitation. Un compartiment de 3 000 mètres carrés est destiné aux 33 vaches laitières, dont 19 sont en lactation. Les autres ce sont des génisses en croissance. Depuis la création de la ferme, le volume de production de lait moyen est de 20 litres par bête et par jour. Pour réussir une telle activité, il faut de la rigueur notamment dans la gestion des animaux. Les montbéliardes se comportent très bien en race pure dans la ferme du Docteur Dramé grâce aux dispositions prises par le vétérinaire et son équipe. Ici, les animaux sont abrités dans un bâtiment bien aéré qui leur offre un confort intéressant, leur évitant de grosses températures souvent légion en Afrique de l’ouest.

 

Une chaîne de commercialisation

La qualité de l’alimentation, composée de fourrages et de concentrés minéraux, leur assure une bonne croissance. Il faut ajouter à cela, de l’eau de bonne qualité à proximité et à volonté, et une hygiène de qualité. « Nous avons des animaux qui s’adaptent très bien, témoigne le scientifique d’ethnie sarakolé qui ne boude pas le plaisir d’avoir développé la génétique au Sénégal, et contribué à la stabilité sociale de la région de Diamniadio qui n’était qu’une banlieue désertique il y a peu. À partir de notre modèle, pas moins de 40 fermes se sont installées sur un rayon de 50 km en utilisant les différentes races étrangères pour améliorer leur production. »

L’enjeu est de promouvoir cette activité afin de la voir devenir la locomotive d’une filière bovine sénégalaise qui souhaite s’adapter aux exigences de modernité. L’État collabore d’ailleurs avec le Dr Dramé. Il explique : « En termes d’importation de semences et races étrangères, notre plus gros client est l’État, grâce aux campagnes nationales d’inséminations artificielles organisées chaque année, pour lesquelles nous apportons notre assistance technique. »

Une telle activité n’est pas sans risques pathogènes : boiteries et mammites sont les pathologies les plus répandues. D’autres, telle la pasteurellose et les maladies liées aux tiques existent mais ont une faible capacité de nuisance sur les animaux. Pour maîtriser les épizooties dans son exploitation, le Dr Drame et son équipe font de la prévention, à travers un plan de couverture sanitaire, permettant aux animaux d’être protégés contre toutes les différentes pathologies répertoriées plus haut. 

L’effectif en ressources humaines de la ferme est notamment constitué de deux techniciens complété par neuf inséminateurs indépendants. Formés par le Dr Dramé, ils interviennent aussi pour des campagnes nationales d’envergure. 

 

Les montbéliardes du Dr El Hadji Dramé dans sa ferme de Diamniadio, au Sénégal. Photo : Silas Bayebane

 

Une ferme pilote

La ferme s’est créé une chaîne de commercialisation de sa production laitière pour gérer les charges liées à son fonctionnement. Ainsi, près de 200 à 300 litres de lait sont vendus à un groupement d’intérêt économique (GIC) composé de jeunes qui eux, les revendent directement à leur réseau de clients. À côté de la commercialisation du lait issu des vaches de sa ferme, le Dr Dramé s’est constitué une clientèle avec les investisseurs qui souhaitent copier son modèle, en répondant notamment à leurs sollicitations en termes de bêtes, d’intrants et d’assistance technique.

Aujourd’hui, il se considère avant toute chose comme un scientifique dévoué au service du développement de la filière bovine lait au Sénégal à travers le développement de l’insémination artificielle. Pour lui, sa ferme est une ferme pilote, et d’ailleurs, un modèle pour les autres promoteurs qui souhaiteraient s’engager sur la voie d’un tel investissement. La vitalité de la filière lait au Sénégal lui doit beaucoup.

 

Afrivet : un projet au Nigeria
Afrivet, au-delà de la ferme laitière, est un cabinet d’expertise qui s’est donné pour mission le développement de l’aspect génétique dans les élevages bovins au Sénégal et même au-delà. La clinique offre des conseils aux différentes fermes qui importent, comme elle, des races étrangères à des fins de croisement, ou à des entreprises qui vendent du lait de vache sur le marché sous régional. « Nous faisons beaucoup de consultance, dont une est d’ailleurs en cours au Nigeria, explique le Dr Dramé. Elle porte sur le programme national de développement de la filière laitière. Cela consiste à inséminer 10 000 vaches dans le pays à travers un réseau d’entreprises Nigérianes qui transforment et commercialisent le lait dans le pays. »

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