Les femmes en première ligne

Si elles ont souvent des difficultés pour accéder à la terre et pour être reconnues dans leur travail, les femmes jouent un rôle crucial dans l’agriculture africaine. C’est ce qu’explique Mariama Sonko, présidente de l’association des organisations professionnelles paysannes du Sénégal.

En Afrique, l’agriculture familiale occupe une place centrale dans l’alimentation. En plus, elle constitue le travail d’environ 70% de la population. Pourtant, les paysans et surtout les paysannes qui créent cette richesse ont un faible accès à la terre et aux ressources de production.

Malgré ces difficultés, les exploitations familiales maintiennent, voire améliorent la production alimentaire grâce à des stratégies d’adaptation et de diversification efficaces. Ainsi, le mouvement "Nous sommes la solution" (NSS) est né pour promouvoir la voix des paysannes et des paysans dans la gouvernance agricole tant locale que nationale et continentale.

500 associations de femmes rurales

NSS a été lancé en 2011 par douze organisations de femmes rurales du Burkina Faso (deux organisations), du Ghana (deux), de la Guinée (deux), du Mali (trois) et du Sénégal (trois). Plus de 500 associations de femmes rurales (AFR) ont adhéré à cette "solution". « Le mouvement panafricain œuvre pour la promotion de l’agriculture écologique et pour la souveraineté alimentaire, explique Mariama Sonko présidente de l’association des organisations professionnelles paysannes (Ajac), adhérente de NSS. Notre vision, c’est une Afrique pour la solidarité. »

Selon Mariama, les femmes sont particulièrement impliquées dans les prises de décision dans la transformation et la commercialisation des produits agricoles pour une alimentation nutritive. « Les femmes sont en train de se mouvoir pour le développement de leur localité. Personne ne peut nier cela », poursuit la présidente de l’Ajac. À l’en croire, beaucoup d’initiatives portées par les femmes méritent d’être soutenues, mais ne le sont pas assez. « Nous avons des problèmes pour vulgariser nos connaissances », se plaint-elle.

« Ce que peut faire l’homme, la femme peut le faire »

La présidente de l’Ajac évoque notamment des connaissances « dans la fertilité des terres ». Elle déclare aussi que les femmes ont des expériences à valoriser en matière de « transformation des céréales ». Ce qui est, dit-elle, « la base de notre alimentation ». Et de fulminer : « Les femmes sont partout. Elles œuvrent toujours pour le bien-être, mais elles ne sont pas assez reconnues ». Tout comme « leur expertise de la terre pour atteindre une meilleure production ». Pour Mariama Sonko, « ce que peut faire l’homme, la femme peut le faire : c’est à partir de notre motivation que nous l’avons démontré ».

Au niveau des localités, les personnes les plus touchées sont souvent les femmes et les jeunes. À cet effet, Mariama se plaint du manque de soutien des dirigeants africains : « Notre soutien émane souvent des donateurs qui proviennent d’autres continents », explique-t-elle. Qu’à cela ne tienne, au Sénégal, Mariama Sonko compte sur le "Plan Sénégal émergent". Un plan qui, d’après elle, est la transition vers l’agro-écologie. Un bon point pour Mariama et ses consœurs. « Nous voulons préserver la semence paysanne et développer la biodiversité, poursuit Mariama. Les semences constituent le premier élément du système alimentaire et des systèmes de production. » L’agricultrice parle de « nécessaire diversité des semences paysannes ». Et de leur « adaptation naturelle aux changements climatiques ». Des facteurs qui doivent encourager leur préservation. D’où cet avertissement lancé par la présidente de l’Ajac : « Il est inconcevable que les semences soient privatisées et manipulées par qui que ce soit. »