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Afrique

Hicham el Habti, président de l’UM6P : "Il faut faire la révolution verte en Afrique autrement"

Publié le 23/10/2023 - 09:00
Hicham el Habti, président de l'UM6P : "Il faut faire la révolution verte en Afrique autrement." Photos : UM6P

Du 10 au 14 octobre 2023, en marge des assemblées annuelles de la Banque mondiale et du FMI qui se sont tenues à Marrakech, l'université Mohammed VI Polytechnique (UM6P) a accueilli 7 000 participants lors de l’événement The Voice Of Africa (la Voix de l’Afrique), à Ben Guerir, au Maroc. Ce cycle de rencontres et conférences a été consacré, entre autres, à l'Afrique, à l'agriculture et à la souveraineté alimentaire du continent, avec l’annonce de plusieurs partenariats. Hicham El Habti, président de l'UM6P, partage sa vision sur le futur de l'agriculture en Afrique, et la contribution que souhaite apporter l’UM6P à l’atteinte de la souveraineté alimentaire du continent. Entretien.

Dans le programme de cette 1re édition de Voice of Africa, l'agriculture africaine semble être au centre des préoccupations des intervenants, mais aussi de celles de l'UM6P…

Hicham El Habti : Tout à fait, et je vais vous l'illustrer par un indicateur : de toutes les écoles [des filières de l’UM6P, NDLR], le Collège de l'agriculture a l'effectif le plus important au sein de l'UM6P, avec 450 personnes. Le deuxième établissement en effectif arrive avec seulement la moitié. Et nous n’allons pas nous arrêter là, avec bientôt 600 personnes dans ce Collège de l'agriculture. Dans ce sens, ce 12 octobre, nous avons signé [un partenariat, NDLR], avec le réseau CGIAR, qui est supporté par la Banque mondiale.

Donc l'agriculture, oui, pour nous, c'est important, car il faut nourrir la population. Et l'Afrique peut nourrir, pas que les Africains, mais le monde entier, car c'est ici qu'il y a encore 60 % des terres arables non cultivées. Maintenant, il faut faire la révolution verte autrement, différemment des autres révolutions vertes qui ont eu lieu dans les années 1970 : en s'appuyant sur la technologie, les résultats de recherche, en valorisant les cultures natives de chaque pays d’Afrique, telles que le sorgho, le millet, le tef, qui sont adaptées au sol et au régime alimentaire [du continent, NDLR]. C'est ainsi que nous croyons que la révolution verte africaine viendra, en créant de nouvelles pratiques, en réduisant les coûts, pour permettre à l'Afrique de ne plus être nette importatrice, mais plutôt nette exportatrice.

Quels sont les pays africains prioritaires dans votre démarche de révolution verte "à l’africaine" ?

H. E. H. : Nous travaillons beaucoup avec la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Togo, le Rwanda, l'Éthiopie, le Ghana, où il y a un programme de recherche conjointe avec les Pays-Bas, autour des cultures et des sols ghanéens, avec des doctorants ghanéens, qui feront un séjour de recherche ici. Et bien d’autres, mais ce sont les pays prioritaires à ce jour.

Et quel impact pour les petits agriculteurs ?

H. E. H. : Vous avez raison de soulever ce point-là, car la taille moyenne d'une parcelle en Afrique est de moins de 2 hectares, alors qu’ailleurs, c’est de l’ordre de 200, voire 300 hectares… Ce que nous faisons au Maroc, nous le faisons avec des agronomes sur le terrain, en contact quotidien avec les fermiers, pour partager avec eux les meilleures pratiques issues des laboratoires de recherche de l'UM6P, dans le cadre du programme Al Moutmir. Al Moutmir est un programme qui mobilise aujourd'hui près de 90 agronomes, avec 400 000 petits fermiers, et qui démontre, avec les mêmes semences, mais des pratiques agricoles différentes, comment améliorer le rendement agricole. À travers Al Moutmir, nous avons introduit, par exemple, le semis direct pour le blé, c’est-à-dire sans labourer la terre, pour garder la matière organique dans le sol, ce qui améliore la productivité du blé malgré la sécheresse, jusqu’à 20 à 30 %, selon les parcelles.

Suite à ces résultats, il y a d'ailleurs un programme ministériel pour aller jusqu’à 1 million d’hectares de semis direct au Maroc [d’ici 2030, NDLR]. Nous espérons étendre cette expérience au niveau de l'Afrique subsaharienne.

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