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Aviculture industrielle tunisienne

La disparition d’Abdelwaheb Ben Ayed

Publié le 09/04/2019 - 09:45
Abdelwaheb Ben Ayed initiateur du premier poulailler industriel en Tunisie.

L’aviculture industrielle tunisienne pleure son père ; le groupe Poulina regrette son fondateur : Abdelwaheb Ben Ayed s’est éteint le 4 avril à Tunis à 81 ans.

L’aviculture industrielle tunisienne vient de perdre son père fondateur, Abdelwaheb Ben Ayed, initiateur du premier poulailler industriel en Tunisie il y a plus de cinquante ans. À cette époque où à chaque maison et  ferme on élevait sa propre volaille pour l’autoconsommation et, en cas de surplus de production, pour les marchés des grandes villes. Un projet qui appelait à la dérision. D’ailleurs, l’unique fois où j’ai eu l’occasion de l’interviewer, feu Ben Ayed m’a raconté le scepticisme des banques quant au financement de son projet qui portait à l’époque une idée extravagante. « Ces mêmes banques me sollicitent aujourd’hui pour m’offrir des crédits », m’avait dit le fondateur du plus grand et prestigieux empire économique en Tunisie, il y a un peu plus de dix ans. Le noyau de cet empire colossal n’est  autre que l’aviculture et s’appelait Poulina.

Aujourd’hui, il laisse un groupe qui opère dans tous les secteurs économiques et qui incarne l’exemple type de l’intégration économique. En fait GPH a un pied partout, dans l’agriculture, le tourisme et loisir, l’industrie de l’acier à celle des bâtiments et l’informatique. Ces projets sont implantés partout dans le pays avant de prendre une envergure internationale avec des installations dans les pays du grand Maghreb et aussi en Chine.

Qui peut mieux raconter son parcours que lui-même. Voici un récit écrit par M. Abdelwaheb Ben Ayed il y a 10 ans comme préface à un livre parlant du Groupe à l’occasion de son introduction à la bourse :

« Curieuse destinée ! Au moment où je bouclais avec Amina, mon épouse, nos bagages pour partir nous installer au Canada, dans des postes de recherche scientifique, l’appel pour la création de Poulina l’emporta. Nous sommes en 1967. De Gaulle lançait son « Vive le Québec Libre ! », attirant les jeunes, la Tunisie s’enlisait dans le coopérativisme, peu enthousiasmant. Nous étions rentrés de Paris, pleins d’énergie et d’ambition, pour nous mettre au service de la patrie. Diplômé en agronomie, pédologie et chimie, je commençais à m’ennuyer dans les bureaux de l’Administration agricole. Amina, spécialiste en biologie avicole, s’impatientait de servir. C’est alors que le déclic s’est produit, le 14 juillet, plus précisément !

Avec une poignée d’amis et de dinars récoltés ici et là (mon père vendit la maison familiale et me prêta ainsi l’argent dont j’avais besoin) Poulina fut fondée.

Centre avicole Terra de Carthage, fondé par Abdelwaheb Ben Ayed et son groupe Poulina. © Jamel Bachtobji

Dès le départ, le projet économique de l’entreprise était soutenu par des valeurs profondes. Nous sommes aux premières années de l’Indépendance, de la construction d’un État moderne et à la recherche d’une économie prospère. Le colonialisme, le racisme et le sous-développement avaient laissé leurs traces. Les jeunes générations, exacerbées par ces affronts, n’avaient qu’une seule ambition : relever autant de défis, atteindre de hauts niveaux de compétence et de performance, édifier une Tunisie Nouvelle. Bref, s’accomplir dans la réussite, personnelle et collective.

Je dois le reconnaître : autant ardente a toujours été ma volonté, autant je n’avais cru, sans jamais désespérer, voir Poulina se convertir en ce holding, en si peu de temps.

Au sein de Poulina, le mérite n’en revient qu’à ceux et à celles qui s’y sont investis avec moi : fondateurs, associés, employés et partenaires. Je dis partenaires pour englober tout un chacun, dans cette large palette de contributeurs directs et indirects, institutionnels et privés, tunisiens et étrangers, qui depuis toujours, ou à une période donnée, ont apporté leur concours à la concrétisation de cette ambition collective.

L’ancrage profond de nos valeurs, la pertinence de notre vision, et la performance de notre système de management, forgés au quotidien depuis plus de 40 ans, aboutissent aujourd’hui à pas moins de 74 entreprises. Elles ont été réunies en 6 grands pôles spécialisés, pour constituer Poulina Group Holding. Un conglomérat solidement implanté en Tunisie, qui s’est étendu aux pays du Maghreb, et à l’international jusqu’en Chine. Créant des milliers d’emplois, des produits innovants et de nouvelles pratiques managériales, relevant chaque jour de nouveaux défis, nous générons une croissance soutenue et des richesses généreuses. Les jeunes générations de la relève, en qui nous avons toujours cru, « injectées » à tous les niveaux, sauront faire plus et mieux.

La mémoire, reconnaissante aux pionniers qui méritent hommage, le regard, fixé sur l’avenir qui accapare toute notre énergie, l’ambition redouble en nous tous.
Que cet ouvrage puisse restituer, au-delà du parcours, l’âme de nos valeurs et projeter la vision d’un futur encore plus prometteur. »

En hommage à son chef M. Lassaad Kdimi, directeur de la communication  au sein du groupe, a écrit qu’il était : « L’un des plus grands hommes d’affaires que la Tunisie ait jamais connu. Il a marqué l’histoire économique de la Tunisie par son génie. Visionnaire hors pair, il était à lui seul une véritable école de management, innovateur sans limite, il ne reculait devant rien pour hisser Poulina Group Holding au premier rang de l’économie tunisienne. »

 

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